
Pourriez-vous évoquer quelques éléments de vos débuts dans le domaine de l’art et vos premiers travaux ? –
Parallèlement à mes études de médecine à l’Université catholique de Louvain (BELGIQUE) j’ai suivi des cours de soir à l’ école Supérieure Artistique Le 75 -à Bruxelles et fréquenté les ateliers de maîtres pastellistes belges
Ma toute première exposition fut organisée à l’Université , et curieusement ma palette de l’époque était plutôt abstraite , mais très vite j’ai dérivé vers le figuratif libre en utilisant le pastel comme procédé d’expression , pour la simple raison que j’aime peindre et dessiner en même temps, et c’est la seule technique qui conjugue à la perfection l’émotion immédiate du trait et la sensualité de la grande peinture dont, par ailleurs elle offre les mêmes possibilités esthétiques

Si vous deviez vous réclamer d’une école ou d’un courant dont vous vous sentez le plus proche, ce seraient lesquelles?
Pour ma part , je n’ai pas choisi ” un camp ” figuratif ou abstrait . Je n’en refuse aucun car s’il est un terrain qui sépare les deux camps, je ne le considère pas comme un champ de bataille mais comme un jardin à cultiver ….et je continue a croire que la frontière entre l’Art figuratif et l’Art abstrait est essentiellement un espace de liberté : celui de la création.
Mais pour répondre à votre question, je dirais que je me situe dans le courant figuratif libre, les artistes de ce courant se réclament de la lignée médiane entre l’expressionisme et le réalisme, en d’autres termes, ils ne présentent pas l’aspect extérieur des choses mais leur signification intérieure; pour cela, l’apparence externe et les détails sont là pour exacerber le sens profond de l’élément présent sur la toile
Vous semblez privilégier le portrait dans votre travail de manière générale, pourquoi cette préférence?
C’est probablement dû à mon intérêt pour l’humain, car je considère que le portrait est la vitrine de l’âme , sauf que le verre n’est pas tout a fait transparent , et exige qu’on fasse un effort de lecture pour transpercer le secret d’une personne , c’est ce qu’on fait quotidiennement quand on fait des rencontres, lire le portrait de notre interlocuteur et essayer de comprendre ce qu’il y a derrière … c’est ce que j’essaie de faire , pousser celui qui regarde ma peinture à sonder le mystère de l’être humain
Vous avez fait des femmes africaines et leur beauté, vos modèles de prédilection, que leur trouvez-vous de si particulier?
Pour être plus précis, mes modèles de prédilection sont des visages des tribus africaines : les Himbas, les Touaregs, les Peules … Ce que j’aime c’est la capture d’une expression brute et essayer de la restituer intacte sans artifice aucun.
Les visages africains appartenant à ces groupes ethniques ont toujours cette authenticité dans les expressions ; ces regards francs, ces sourires radieux qui ne sont pas encore usés par les convenances sociales de la vie moderne.
D’un autre côté, c’est un regard tourné non pas vers l’extérieur mais vers l’intérieur vers nos origines. Nous sommes africains et peindre les africains, c’est comme un retour aux sources de la Terre mère.
En ignorant la femme marocaine, ne craignez-vous pas de faire l’objet de critiques acerbes ?
L’artiste se définit avant tout par la liberté des thèmes choisis. Je peins ce qui me touche et m’inspire et je présente un point de vue de ma réalité au public qui adhère ou pas.
D’ailleurs, il est totalement faux de dire que je ne fais pas de portraits de femmes et d’hommes du Maroc.
Dans les années 1990-2000, j’ai organisé plusieurs expositions sur « Femmes du Maroc » ou j’ai essayé d’exprimer à travers mes portraits, la diversité culturelle de mon pays. C’était un voyage du Nord au Sud, avec une palette de couleurs, une mosaïque de nuances et de subtilités que j’ai essayé de mettre en évidence.
Beaucoup d’artistes occidentaux livrent sans complexe ni culpabilité leur regards sur les autres cultures (Delacroix, matisse et bien d’autres) , n’aurais-je pas le droit d’offrir le regard d’un marocain sur les cultures subsahariennes ?
Vous soulignez souvent votre attachement par ailleurs au pastel, y aurait-il un secret à percer pour comprendre ce choix?
Peindre à la manière du pastel existe pour ainsi dire depuis que l’Homme est créatif. N’est-il pas émouvant de voir que les peintures réalisées à l’aide de terres ocre rouge ou ocre jaune, qui ornent les parois des grottes préhistoriques sont déjà du pastel ? A savoir une poudre composée de pigments de couleur à l’état pur.
Aujourd’hui, cette technique enrichie des nombreuses expériences du passé (puisqu’il a connu un âge d’or vers le XVII ième siècle ), offre des possibilités infinies aux nouveaux pastellistes. Des couleurs les plus violentes aux tons les plus doux et complexes, des techniques du dessin à celles de la peinture, toutes les audaces sont permises.
Par ailleurs, cette technique conjugue à la perfection l’émotion immédiate du trait et la sensualité de la grande peinture dont, par ailleurs elle offre les mêmes possibilités esthétiques.
Personnellement je trouve que le Pastel de part sa brillance et le chatoiement de ces tonalités pâles rend le matériau idéal pour restituer les effets de la lumière.
Curieusement vous êtes plus visible et mieux connu à l’étranger que dans votre propre pays, le Maroc. Ne trouvez-vous pas cette situation incompréhensible ?.
Je suis très présent sur le web puisque j’ai un site www.latrache.com où j’expose différents tableaux à travers des galeries virtuelles. Des galeries étrangères qui font des prospections sur le net m’ont contacté par le biais de ce site pour m’organiser des expositions. Je me suis également inscrit à des concours et des rencontres artistiques et j’ai pu glané quelques prix ( Aigle de Nice ..) .Les galeries marocaines ne font pas ce travail d’aller à la découverte de nouveaux artistes sur la toile. Il faut aller à leur rencontre, il faut carrément les démarcher et je n’ai pas toujours le temps puisque, comme vous le savez, je suis médecin à plein temps.
Par ailleurs, les galeries marocaines sont moins friandes de la peinture figurative, les peintres qui percent actuellement font pour la majorité de l’abstrait. Ceci étant dit, quand je suis sollicité, je réponds toujours favorablement.
Peut-on avoir quelques indications sur vos projets futurs à court terme?
La prochaine exposition sera en Amérique latine, probablement le Panama , j’ai déjà exposé à Lima au Pérou, et je trouve que le publique latino-américain est très sensible à mon travail