Selon le Figaro, Paris serait mécontent de la position de Washington sur le Niger
La France agacée par la nouvelle position américaine sur le Niger
Ainsi soit-il et l’idée d’un conflit semble s’éloigner !
La France espérait une intervention militaire de la CEDEAO de la manière la plus expéditive et la moins risquée pour les intérêts français , mais la Maison Blanche a privilégié son partenariat militaire avec l’armée du Niger plutôt que » l’ordre constitutionnel » voulu officiellement par Paris.
Ainsi soit-il et l’idée d’un conflit semble s’éloigner, la CEDEAO n’ira jamais déclencher une opération militaire si Washington s’y oppose.
A la tête de la CEDEAO, le président du Nigéria , Bola Tinubu qui a fait ses études et sa fortune à Chicago , privilégie désormais le dialogue après avoir laissé planer le doute quant à l’éventualité d’une intervention militaire .
Réunis au Ghana ce jeudi 17 août, les chefs d’états majors de la CEDEAO tentaient encore de rendre possible pourtant une intervention militaire malgré l’opposition de certains pays.
Le spectre d’un scénario à la libyenne qui menacerait de déstabilisation totale la région du Sahel devrait toutefois les dissuader d’un saut vers l’inconnu, même si ces derniers comptent sur l’appui de l’armée française .
En attendant , l’Union Africaine rejette toute intervention militaire et a décidé de se désolidariser de la CEDEAO !
Tous les voisins du Niger ne veulent pas d’une guerre : Il y a d’abord le Mali , le Burkina Faso et la Guinée en raison de leurs relations avec les putschistes et puis, le Togo et le Bénin, voies portuaires des maigres ressources du Niger .
La maison blanche joue désormais » la carte du dialogue » et s’implique au Niger car elle y a investi des millions de dollars dans le cadre de la lutte contre le présumé terrorisme Djihadiste .
Paris avait brandi le prétexte du terrorisme au Sahel, et Washington l’a pris en mot profitant d’un alibi pour installer des bases au Niger , dont la précieuse base équipée de drones armés MQ-9 Reaper , près d’Agadez .
Selon Leslie Varennes, de l’Institut de veille des relations internationales et d’Etudes et stratégiques IVERIS : » De cette base , les américains surveillent les groupes Djihadistes au Sahel, au Mali , ou au nord du Nigeria et de là, ils surveillent même la Libye et l’Algérie ! »
Une autre raison prise sérieusement en considération par les américains, c’est que les milices de Wagner pourraient revenir, comme au Mali après le coup d’état de 2021 .
En outre, les élections de 2024 pointent déjà à l’horizon et Joe Biden traine le lourd passif du retrait unilatéral des troupes américaines d’Afghanistan en août 2021 : il fallait ainsi éviter à tout prix une guerre au Sahel !
Après l’enlisement de la guerre d’Ukraine où les américains paient un lourd tribut, il était politiquement suicidaire de s’engager dans un nouveau conflit.
Le camouflet de trop pour Paris !
Toutes ces péripéties diplomatiques et ces rebondissements stratégiques sont intervenues alors que l’étau semblait se resserrer autour des putschistes et constituent un camouflet incroyable pour Paris si l’on considère également le ressentiment contre la France qui anime les populations du Sahel !
La position de Washington sur le Niger et, notamment, les résultats de la visite de la sous-secrétaire d’État américaine par intérim, Victoria Nuland, dans ce pays, ainsi que ses contacts avec les nouvelles autorités ont suscité le mécontentement de Paris. C’est ce qu’a fait savoir Le Figaro, se référant à une source diplomatique française.
« Ils ont fait tout le contraire de ce qu’on pensait qu’ils feraient », est-il indiqué. « Avec des alliés comme ça, on n’a pas besoin d’ennemis. »
Le journal rappelle que, depuis le début du coup d’État au Niger, la France avait maintenu une ligne claire, c’est-à-dire, le retour de Mohamed Bazoum à la présidence. « Pour Emmanuel Macron, la crédibilité de la France, notamment en termes de discours sur la démocratie, était en jeu.
Pour les Américains, même s’ils sont aussi préoccupés par un retour rapide à l’ordre constitutionnel, la priorité, c’est la stabilité de la région », a noté la source.
Alors que Paris a soutenu la décision de la Cédéao sur la mobilisation des forces de réserve pour préparer une opération militaire contre les militaires au Niger, les États-Unis, note Le Figaro, par l’intermédiaire du secrétaire d’État Antony Blinken, se sont empressés de prôner une solution pacifique au Niger et ont progressivement cessé d’exiger le retour au pouvoir du président déchu, se concentrant sur la libération de Mohamed Bazoum et sur les conditions de sa détention.
Priorités américaines
« L’objectif des Américains est simple: conserver leurs bases », explique un diplomate français. « Si pour cela il faut tirer un trait sur le retour à la légalité constitutionnelle, ils n’hésiteront pas.
Les militaires nigériens ne poseront probablement pas de problème d’ailleurs: ils savent que sans les capacités de surveillance américaines, tous leurs efforts pour combattre les djihadistes sont vains. »
Les États-Unis ont effectivement un contingent assez important au Niger et le Pentagone a bien reconnu que la majorité des militaires au pouvoir dans les trois pays du Sahel ont été formés en Amérique !
Environ 1.300 militaires sont répartis entre les bases de Niamey et d’Agadez, dans le nord du pays. C’est la base d’Agadez qui revêt une importance stratégique pour le Pentagone, car elle abrite une piste d’atterrissage pour les drones, ainsi qu’un centre de surveillance pour toute la région, notamment pour la Libye.
Par ailleurs, les États-Unis ont un canal parmi les putschistes, c’est Moussa Salaou Barmou, nommé chef d’état-major général des forces armées nigériennes. Selon Le Figaro, il a été formé aux États-Unis et a gardé des contacts étroits avec eux, et c’est avec lui que Victoria Nuland s’est entretenue à Niamey.
Toutefois, malgré sa proximité avec Washington, Moussa Salaou Barmou, selon le journal, n’a pas encore montré une attitude favorable à l’égard de ses anciens instructeurs.
Paris est aussi mécontent par le fait que, malgré le nombre à peu près égal de militaires américains et français, soit 1.500 personnes, au Niger, le ressentiment dans le pays ne s’exprime qu’à l’égard des soldats français. « Les États-Unis, comme nos autres alliés d’ailleurs, ont l’habitude de nous laisser prendre les coups », a noté la source.
Le journal estime que la perception hostile des rebelles à l’égard de la France est due à son passé colonial et à l’échec de l’opération Barkhane de 2014 à 2022, une opération menée par les forces armées de la République pour lutter contre les groupes islamistes au Mali, au Burkina Faso, en Mauritanie, au Niger et au Tchad.
Des fissures flagrantes et des fractures profondes sont en train de déchirer le camp occidental !
Il est clair que Washington ne tient pas à devoir quitter Niamey et surtout Agadez où il a lourdement investi ( Infographie : The Washington Post )
Il est clair que Washington ne tient pas à devoir quitter Niamey et surtout Agadez où il a lourdement investi ( Infographie : The Washington Post )
Selon le Pentagone, pas question de terminer le partenariat militaire et de tirer un trait sur les investissements consentis et Il est clair que Washington ne tient pas à devoir quitter Niamey et surtout Agadez où il a lourdement investi!
Ces déclarations de la porte-parole Sabrina Singh ont l’avantage d’être plus éclairantes que celle d’Antony Blinken, le chef de la diplomatie américaine qui a assuré mardi qu’il était encore possible de mettre fin au coup d’Etat au Niger via la diplomatie: « Nous restons concentrés sur la voie diplomatique pour obtenir les résultats que nous voulons, à savoir le retour à l’ordre constitutionnel, et je crois qu’il continue d’exister une marge pour obtenir ce résultat par la diplomatie ».
Autant, les puissances occidentales ont fait front commun contre la Russie pour la guerre d’Ukraine et accessoirement pour la croisade contre la Syrie, autant pour le Niger et plus généralement pour le Sahel , les intérêts des uns et des autres sont tellement divergents qu’ on est en situation de conflit et de crise ouverte .
Ils sont membres permanents au sein du Conseil de Sécurité des Nations -unies, ils sont en principe alliés au sein de l’OTAN, ils sont partenaires au G7 , à l’OMC et autres institutions internationales mais dans certaines régions du monde l’opposition est carrément frontale !
En Irak, lors de la première guerre du Golfe Washington avait réussi à avoir une coalition de près de cinquante pays , bénéficiant du suivisme des européens et de l’alignement d’autres mais en même temps du financement de cette intervention militaire par les monarchie du Golfe, Arabie Saoudite en tête.
En Syrie ou en Libye par contre, on les verra en rangs dispersés vu la présence de l’armée russe de l’autre côté.
Deux ans après le dossier des sous-marins pour l’Australie et le froid diplomatique qui a régné entre l’Elysée et la Maison Blanche , on voit bien qu’au Niger les divergences entre Paris et Washington sont passées au stade supérieur , voire même ultime et inextricable !
En conclusion, n’ y a t-il pas moyen pour les grandes puissances de trouver un accord pour le partage de l’uranium sans détruire le Niger et tuer des milliers de civils !?
Il se peut que tout dépendra de l’attitude de Moscou et cela pour le moment, c’est la grande inconnue..
Sinon pour terminer , les militaires au pouvoir au Mali , au Burkina Faso et au Niger peuvent désormais dormir sur leurs lauriers , du moins jusqu’à la prochaine présidentielle américaine !
Et le prochain locataire de la Maison Blanche pourrait adopter une toute autre doctrine car avec la diplomatie de cowboys et le complexe militaro-industriel , le Pentagone a toujours le doigt sur la gâchette !
Hafid FASI FIHRI