La justice algérienne se retrouve, à nouveau, au cœur d’une controverse politique majeure, illustrée par le récent réquisitoire du parquet de Constantine. Le 31 octobre, une peine de dix ans d’emprisonnement a été requise contre l’opposante franco-algérienne Amira Bouraoui, tandis que trois ans ont été demandés pour le journaliste algérien Mustapha Bendjama, révèle l’un des avocats de la défense. Ces accusations ont soulevé des inquiétudes parmi les observateurs des droits de l’homme et des militants démocratiques, avec un verdict attendu pour le 7 novembre, comme le souligne le Comité national pour la libération des détenus (CNLD).
Amira Bouraoui, médecin et militante âgée de 46 ans, a été jugée par contumace pour avoir quitté l’Algérie pour la Tunisie le 3 février, malgré une interdiction officielle. L’arrestation de Bouraoui à Tunis, suivie par son départ réussi pour la France, a déclenché une onde de choc diplomatique entre l’Algérie et la France, que Me Abdellah Heboul a détaillée avec précaution. Bien que les tensions se soient atténuées, la répercussion judiciaire à l’encontre de Bouraoui et de ceux qui l’ont aidée reste manifeste.
Cinq ans d’emprisonnement ont été également réclamés contre un agent de la police des frontières, Ali Takaida, et des peines similaires pour d’autres associés, sur des accusations de formation d’un réseau criminel pour faciliter une émigration clandestine. Ces mesures rigoureuses indiquent une réponse judiciaire dure face à des actes qui, selon certains, relèvent plus de la dissidence politique que du crime.
Bouraoui, connue pour son rôle dans le mouvement Barakat et le Hirak, ainsi que pour son travail à Radio M, représente une figure de proue de l’opposition démocratique en Algérie. Son cas est considéré par certains comme un baromètre de la liberté d’expression et de la résistance civile dans le pays.
L’affaire Bendjama, arrêté le 8 février et déjà condamné à vingt mois de prison, dont huit fermes, souligne la position vulnérable des journalistes algériens. Les chefs d’accusation à son encontre évoquent la divulgation d’informations secrètes, un sujet délicat qui touche à la liberté de presse.
Abdou Semmar, Directeur de Publication d’Algérie Part, dans un podcast vidéo éloquent, a décrit ce « procès politique » comme destructeur pour les vies des innocents impliqués, allant jusqu’à le qualifier de « tâche noire » pour la justice algérienne. Le cas Bouraoui, initialement présenté comme un « Scandale d’État » en février 2023, est maintenant perçu par certains comme une tragédie personnelle – l’exil forcé d’une femme qui ne se sentait plus en sécurité dans son pays.
L’Algérie navigue dans des eaux politiques troubles et orageuses sous la présidence de Tebboune, épaulé par ses alliés militaires. Le procès de Bouraoui et de ses coaccusés illustre de manière préoccupante les obstacles tenaces en matière de respect des droits civiques et d’intégrité judiciaire. Dans ce contexte, la sévérité des jugements portés contre des voix journalistiques indépendantes, à l’instar d’Abdou Semmar, révèle une tendance alarmante à réprimer la liberté d’expression. Des peines exorbitantes, frôlant l’irréversible peine capitale, sont infligées à ceux qui osent simplement partager leur perspective, jetant une ombre sombre sur l’avenir de la démocratie en Algérie.