Alors que la France se prépare pour le second tour des législatives, la possibilité de voir le Rassemblement National (RN) obtenir la majorité absolue soulève de vives inquiétudes parmi les professionnels de santé et les ingénieurs d’origine maghrébine. Sous la présidence de Jordan Bardella, le RN a placé l’immigration au cœur de sa campagne électorale, alimentant la crainte d’un exode des talents maghrébins de France.
Tasnime Labiedh, une microbiologiste tunisienne de 33 ans, résume le sentiment de beaucoup : « Nous ne sommes déjà pas gâtés ici, mais si nous avons Jordan Bardella comme Premier ministre, ce sera sinistre. Ils jouent sur la peur de l’autre. » Arrivée en France en 2021 pour un stage médical durant la pandémie de Covid-19, elle travaille désormais avec un salaire inférieur à celui de ses homologues français et envisage sérieusement de s’installer en Suisse.
Un récent sondage mené par Reuters révèle que six des onze médecins d’origine maghrébine interrogés ont déjà pris la décision de quitter la France. L’un d’entre eux a émigré au Canada il y a un mois. Cette tendance pourrait avoir des conséquences graves pour le système de santé français, déjà en difficulté. Avec seulement 3,17 médecins pour 1000 habitants, la France connaît l’une des plus fortes pénuries de médecins parmi les pays de l’OCDE, après le Luxembourg.
Leila Elamrani, médecin urgentiste marocaine arrivée en France en 2004, souligne les défis quotidiens auxquels elle est confrontée : « Les gens n’ont pas de médecin généraliste, alors ils viennent ici pour un rhume, pour un certificat médical pour prendre un arrêt maladie. Cela, ajouté au vieillissement de la population et au manque de ressources, crée un énorme désordre. »
Hicham Benaissa, sociologue au CNRS, dénonce ce qu’il appelle une « immense hypocrisie » : « L’extrême droite prospère en France sur le sujet de l’immigration, en présentant les migrants comme un problème. Mais si demain les migrants arrêtaient de travailler, c’est tout notre système social et économique qui serait paralysé. »
Ses propos sont corroborés par une étude menée auprès de 350 médecins d’origine nord-africaine en France, dont les résultats seront publiés l’année prochaine. Selon cette étude, 75 % des médecins, qu’ils soient formés à l’étranger ou nés en France, envisagent d’émigrer. En 2023, 29 238 médecins exerçant en France ont été formés hors de l’UE, représentant environ 7 % de l’effectif total. Les médecins maghrébins représentent plus de la moitié de ces praticiens formés hors UE.
Malgré les assurances de Jordan Bardella, qui a déclaré que « nos compatriotes de nationalité ou d’origine étrangère qui travaillent, paient leurs impôts, respectent la loi et aiment notre pays n’ont rien à craindre », les médecins maghrébins restent sceptiques. Widad Abdi, médecin et représentant du SNPADHUE (Syndicat National des Praticiens à Diplôme Hors Union Européenne), souligne que les politiques actuelles ne s’attaquent pas aux problèmes structurels du système de santé : « Qu’ils soient étrangers ou non, de plus en plus de médecins partent. Le système de santé ne les incite pas à rester : les conditions de travail, les salaires, les horaires, le nombre de patients a augmenté et le nombre de médecins a diminué. »
Face à ces défis, la France risque de voir partir une part significative de ses professionnels de santé d’origine maghrébine, aggravant une situation déjà critique dans le domaine médical. La perspective d’une victoire du RN pourrait donc accélérer cette tendance, avec des conséquences potentiellement désastreuses pour l’accès aux soins dans le pays.
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El Mghari Tabib
3 mois il y a
Ces compétences perdues pour leurs pays d’origine n’ont qu’à y retourner pour participer au développement de pays qui les ont formés et les aider à se mettre à niveau et ils seront bien respectés chez eux .
Ces compétences perdues pour leurs pays d’origine n’ont qu’à y retourner pour participer au développement de pays qui les ont formés et les aider à se mettre à niveau et ils seront bien respectés chez eux .