Niché au fin fond de l’océan Atlantique, au large de Dakhla, le Mont Tropic regorge de richesses, notamment des minerais stratégiques comme le cobalt et le tellure, et attise bien des convoitises. Selon la presse espagnole, le Portugal a effectué une mission d’exploration au sud des Canaries, là où gît le plus important gisement de minerais que le Maroc et l’Espagne convoitent également.
Les intérêts communs des trois pays, à savoir le Maroc, l’Espagne et le Portugal, vont au-delà de l’organisation conjointe de la Coupe du Monde 2030. Le principal navire océanographique portugais, le NI Mario Ruivo, dont la récente restauration a coûté plus de 3,5 millions d’euros au gouvernement de Lisbonne, a jeté l’ancre le 15 juin dernier dans la zone maritime où se trouve le Mont Tropic. Ce fond marin aux nombreuses richesses minières, telles que le cobalt ou le tellure, est très prisé dans les industries de pointe et de défense, suscitant un grand intérêt de la part des gouvernements.
Selon la presse espagnole qui a suivi les traces du bâtiment de recherche scientifique marine, le système de suivi des navires a été désactivé lorsque l’équipage du navire portugais était sur le mont sous-marin Tropic. Le navire a la capacité de sonder jusqu’à 10 000 mètres de profondeur.
« Il ne faut pas oublier qu’une partie des Canaries est sous souveraineté portugaise, bien qu’elle reste dans le domaine de compétence de l’armée de l’air et de l’espace espagnol, à savoir les îles Sauvages. En décembre, cela fera 10 ans que l’Espagne a demandé à l’ONU l’extension des eaux juridictionnelles au sud des îles », rappelle le média ibérique pour expliquer ce geste de la part des autorités espagnoles à l’égard de leurs voisins.
Au-delà de la présence, ce sont les visées de Lisbonne sur cette richesse qui dérangent en Espagne. Mais qu’en est-il du Royaume?
Jamais sans le Sahara
Dans le cas du Maroc, c’est le dossier du Sahara qui devrait sceller le sort de cette caverne d’Ali Baba sous-marine. Tant que ce dossier n’est pas clos une fois pour toutes, aucune avancée ne peut être entreprise à ce sujet, souligne un chercheur marocain en relations internationales.
Cependant, une partie de la presse espagnole, rompue aux conflits avec le Maroc, croit savoir que cette richesse serait une source de tensions entre les voisins qui viennent à peine d’enterrer la hache de guerre. Dans une déclaration, le professeur universitaire Rafael Muñoz a indiqué à Vozpópuli que « une fois acceptée la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental, le niveau de tension pourrait augmenter, avec la question de la délimitation des futures ZEE (zone économique exclusive, ndlr), qui pourraient cacher des contrats juteux de prospection de ressources minérales du fond marin ».
Sous nos cieux, l’optimisme cède la place à ces scénarios belliqueux. « Tout porte à croire que les trois partenaires scelleront un accord de partenariat, une sorte de joint-venture pour contrôler la chaîne de valeur. Le transfert du savoir-faire couplé à des investissements colossaux au profit des entreprises du pays en mesure de transformer ces richesses brutes en des actifs de qualité,… Voilà comment les trois prétendants peuvent tirer profit de cette aubaine », note une source. « Seulement, tout cela dépendra bien entendu de la position ferme et constante adoptée par les deux pays concernant le dossier du Sahara », met en garde notre interlocuteur.
Mais comment ce « deal » pourrait-il résister aux aléas qui surviennent au lendemain d’un changement du cycle politique, surtout en Espagne où les partis « marocophobes » ne cachent plus leurs intentions à l’adresse du Maroc?
« Certes, il n’y a pas de certitude en géopolitique, mais entre le Maroc et l’Espagne, il ne devrait pas y avoir de régression en matière de relations bilatérales. C’est un point de non-retour entre Rabat et Madrid et ces relations sont appelées à se consolider davantage. En ce qui concerne le Portugal, il s’agit d’un pays vers lequel le Maroc a tendu la main dernièrement, comme en attestent les visites échangées ; et la célébration de la Coupe du Monde devrait approfondir davantage les liens luso-marocains », soutient un expert.
Du côté de la presse espagnole, on estime que les enjeux à long terme dépassent ce trio et incluent des pays comme la Grande-Bretagne, voire Israël. De même, des projets comme le gazoduc sous-marin entre le Nigeria et le Maroc, une œuvre reconnue de haute valeur géostratégique, qui dépend de la titularité de la ZEE par laquelle le tracé doit passer, aura son mot à dire concernant cet héritage sous-marin convoité de toutes parts.